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Tendances des marchés - février 2018 - PAPIERS RECUPERES

13/03/2018

Le prix du 1.02 en chute libre.

Le prix du 1.02 ressort à zéro, quand il n'est pas négatif ! Une situation déjà vécue en 2008, mais dans un contexte de crise économique.
Actuellement, il ne s'agit pas d'un ralentissement de la production, mais d'une sur-offre provoquée par la politique de la Chine. Et le fait que ses licences d'importations soient à renouveler tous les trois mois, nuit à la visibilité du marché. Le problème touche surtout le 1.02 mais aussi les sortes carton. Estimé en janvier dans une fourchette de prix de 23 euros/t à 29 euros/t, le prix du 1.02 a chuté en février d'au moins 25 euros/t. Et ce, alors que des papetiers ont tenté de négocier une baisse de prix jusqu'à 40 euros/t. Ce qu'ils n'ont pu obtenir. Mais la qualité est différente, selon que la marchandise est issue de la collecte sélective ou de la collecte industrielle. (voir paragraphe « le problème de la qualité ».)
Quant au 1.01 (papiers-cartons non triés), il est devenu très difficile à vendre. Les tarifs des brochures et du désencrage ont aussi reculé, de 10 euros/t mais avec des ajustements jusqu'à -15 euros/t. Un contact déplore que l'interférence entre les sortes brunes et le désencrage joue pour augmenter, mais pas pour diminuer dans une même mesure. S'agissant de la sorte 1.11, elle rencontre plus de difficulté pour se vendre. Notre interlocuteur justifie ce constat par la préférence donnée à la collecte sélective par contrat et le fait que les sortes 1.06 et 1.09 soient plus demandées. Quelques baisses de prix ont également été observées sur les qualités moyennes et l'Afnor VII. A noter que la baisse de prix des rognures blanches peu imprimées (2.03) dépend des sortes. Ainsi, la belle qualité a coûté 5 euros/t de moins, tandis qu'une moins belle qualité a coûté jusqu'à 15 euros/t en moins.
L'Espagne a subi le même mouvement à la baisse des prix qu'en France, pour les qualités brunes et le désencrage. Toutefois, les tarifs des rognures neuves de caisserie (4.01), se sont maintenus. Dans les belles et moyennes sortes, le Blanc 1 et le Blanc d'enveloppes sont restés au même prix et le reste a diminué entre 10 et 15 euros/t. Les niveaux de stocks restent toujours énormes et une nouvelle baisse de prix en mars n'est pas du tout écartée car les prix nationaux sont bien supérieurs à ceux pratiqués à la grande exportation.
En Allemagne, les stocks de 1.02 se révèlent extrêmement élevés du fait des importations en provenance de l'Angleterre et des Pays-Bas. Les prix allemands des sortes brunes ont donc aussi reculé de 25 euros/t (parfois à minima) et de 10 à 15 euros/t pour les brochures et le désencrage.
Selon les statistiques du commerce extérieur français compilées par Pap'Argus, 12 311 tonnes de papiers cartons récupérés ont été exportées en Chine en décembre 2017, contre 42 863 tonnes un an auparavant. En cumul, ce sont 344 318 tonnes qui y ont été livrées sur l'année 2017, contre 378 084 tonnes en 2016, soit un déficit de 8,9 %. Par ailleurs, la France a importé 67 450 tonnes du Royaume-Uni sur l'année 2017, contre 57 630 tonnes en 2016, soit une augmentation de 17 %.

 

Parallèle avec 2008

 

C'est en novembre 2008, que les prix ont chuté jusqu'à devenir négatifs. Retour sur le Pap'Argus de ce mois-là. Le 1.02 est alors ressorti avec une fourchette de -30 euros/t/ 0 euro/t. A l'époque, cette situation était le résultat d'un engorgement des stocks, mais qui était la conséquence de la crise économique, avec un recul de la production. A la baisse de la demande des papetiers s'ajoutaient le recul des exportations vers la Chine (touchée aussi par la crise) et les importations massives en provenance du Royaume-Uni (en raison du manque d'industrie papetière locale). Certaines sortes étaient ainsi considérées sans valeur marchande. Dans ce contexte de prix négatifs, le producteur de papiers récupérés doit payer pour que sa marchandise soit enlevée. Mais les récupérateurs étaient confrontés à des imprimeurs qui n'avaient pas les moyens de payer l'enlèvement de leurs chutes. Cette situation particulière avait duré 7 mois.
Dix ans après, les prix sont affectés de la même façon, mais cette fois la demande des papetiers est forte. Du fait de la chute des exportations vers la Chine, les stocks restent sur les bras des récupérateurs. L'équilibre est rompu. Un contact évoque à contre cœur l'éventualité de l'incinération. A cela, s'ajoute les conséquences du temps très pluvieux. Les marchandises livrées aux papetiers sont humides, ce qui peut représenter un double-risque : des fumées à cause de la fermentation et des bourrages dans le process de certains papetiers.
Les baisses de prix des PCR apportent une bouffée d'air aux papetiers, certains évoquant la possibilité d'investir. A contrario, avec les prix à zéro ou négatifs, les récupérateurs commencent à laisser les chutes chez les imprimeurs, au lieu de leur racheter.
Le titre du Pap'Argus de 2008 pourrait encore convenir pour 2018 à savoir : « inquiétude au présent et angoisse pour les mois à venir », car les récupérateurs ne voient pas le bout du tunnel, une même tendance baissière étant attendue en mars.

 

Le problème de la qualité

 

La situation va mettre du temps pour s'améliorer. Actuellement, les sortes 1.01 et 1.02 sont délaissées au profit de sortes de meilleure qualité. Suite à la chute des exportations vers la Chine, tous les stocks ne trouvent plus preneurs, malgré les contrats et les clients réguliers. Un interlocuteur estime que le problème vient surtout de la collecte sélective dans les poubelles jaunes. Nous ne trions pas bien à la source ! Ce qui est accentué par l'extension des consignes de tri du plastique. En France, le tri sélectif est à 70% en multi matériaux, ce qui pose problème aux centres de tri. En Angleterre aussi, la collecte est en mélange, c'est la « commingled collection ». A la différence du reste de l'Europe qui sépare les papiers - cartons des autres matériaux. L'industrie papetière en Europe demande l'arrêt de la collecte en mélange. Le marché a changé avec les nouvelles priorités de la Chine : par conséquent le mode de collecte doit faire de même. Citeo travaille dans ce sens, sa feuille de route indiquant la séparation à la source des papiers et cartons afin de réduire les coûts de traitement et de tri.